call for papers: “La production de sens nouveau dans le contact culturel”

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Journée d’études

La production de sens nouveau dans le contact culturel: “bricolages” et “branchements”

INALCO, 11 octobre 2013 

Un nombre important de concepts anthropologiques, sociologiques ou historiques ont été forgés pour décrire et expliquer les phénomènes qui surgissent lorsque deux ou plusieurs cultures entrent en contact et que sous-tend aujourd’hui le terme acculturation. Celles-ci empruntent, s’hybrident, résistent ou s’assimilent. Derrière ces résultats observables et partiellement quantifiables, ce sont des processus symboliques, de production de sens, qui se mettent en place et ce sont eux qui nous intéressent tout particulièrement ici. Comment les sociétés créent-elles du symbolique, dans quelles conditions et en appliquant quelles méthodes ?

Tout particulièrement, nous aimerions reprendre ici la métaphore du bricolage, sorte de “concept voyageur” d’un champ disciplinaire à l’autre, d’un point de vue idéologique à l’autre : défini à l’origine par Lévi-Strauss, repris par Roger Bastide et Georges Balandier, critiqué (d’ailleurs de manière différente) par Ricœur ou Derrida, il est remis en lumière par le sociologue François Bourricaud ou, plus récemment, par l’anthropologue André Mary.

Le propre du bricolage est de produire du sens en comblant des « trous » dans la perception collective de soi, à partir d’éléments empruntés à une autre culture. Ces éléments ne sont cependant ni choisis au hasard, ni réutilisés arbitrairement. Tout au contraire, la sélection s’opère en fonction des précontraintes de la matière symbolique qui est marquée par son usage antérieur. Le bricolage résulte, le plus souvent, dans le principe de coupure, à savoir le cloisonnement des domaines de l’existence. Par exemple, les Noirs du Brésil vont à la fois à la messe et sont adeptes d’un culte de possession. Comme le note Bastide, « la coupure est nécessaire afin d’éviter la rupture ». Mais comment interpréter la situation décrite par François Villeneuve « à propos d’un temple de la région de Pétra, où la même religion (mais est-ce bien la même ?) s’exprime en façade du temple par un attirail iconographique posthellénistique, et dans le secret de l’intérieur du temple sous une forme aniconique, voire iconophobe : le culte des bétyles. » S’agit-il d’un bricolage et d’une coupure dehors/dedans ou d’un procédé symbolique plus difficile à expliquer ?

La métaphore du « branchement », opposée à celle du bricolage par J.-L. Amselle, permet-elle une meilleure approche, si on la lui substitue ou si on l’y articule dialectiquement ? « Pour échapper à cette idée de mélange par homogénéisation et par hybridation, il faut postuler au contraire que toute société est métisse et donc que le métissage est le produit d’entités déjà mêlées, renvoyant à l’infini l’idée d’une pureté originaire. […] En utilisant la métaphore du branchement, on peut également montrer, à l’encontre des tenants de la thèse de la globalisation contemporaine, que celle-ci, loin d’être nouvelle, prend en réalité la suite de dispositifs de globalisation antérieurs. Le syncrétisme n’existe en effet qu’au deuxième degré, renvoyant à l’infini ou mettant en abîme l’idée même d’une tradition originaire. »

Au reste, on peut tout aussi bien envisager que le recours à ces concepts-métaphores soit aussi producteur de sens pour l’historiographe qui se penche à son tour sur telle ou telle étude, préalablement extérieure à cette optique interprétative, de ces mutations et hybridations culturelles.

Nous aimerions inviter à une exploration de ces opérations de sélection et de rapiéçage en partant des exemples offerts par le domaine européen et extra-européen.

Date limite 15 mai 2013